Comment s'organiser pour être acteurs de notre revenu ?
L'organisation des producteurs
est au cœur de l'actualité agricole, et plus particulièrement de celle de la
filière laitière. Pour témoigner de leurs expériences lors de la journée
laitière, la FDSEA a fait intervenir Georges Guézénoc, producteur de légumes bio
à Kerlouan et Daniel Koller, secrétaire Romand de la Fédération des Producteurs
Suisses de Lait (PSL).
Être plus fort face aux expéditeurs !
" Il y a 50 ans, les
producteurs de légumes se sont regroupés pour être plus forts face aux
expéditeurs. Avant la création de l'organisation économique, le
Cerafel, les producteurs n'avaient aucune transparence sur les volumes et les
prix " explique Georges Guézénoc. " Malgré des actions de
gestion de marché indispensables à la filière, aux dires des anciens, la mise
en place de l'organisation économique fut dure. Pourtant des groupes de
producteurs qui initialement étaient opposés au système, l'ont progressivement
rejoint. Le cadran, outil de mise en marché géré par le Cerafel, a favorisé
cette transparence sur les transactions. Georges Guézénoc rajoute que le
rééquilibrage des rapports de force, au travers de l'AOP Cerafel, a permis de
bâtir des relations plus constructives avec les expéditeurs.
L'AOP Cerafel, reconnue Association
d'Organisations de Producteurs depuis décembre 2008, a pour but de coordonner
les actions des Organisations de Producteurs (OP) visant notamment la gestion de
marché, la recherche et l'expérimentation. " Mais pour être efficace, il
faut des règles respectées de tous, comme celles de l'apport total et du strict
respect du cahier des charges. Les producteurs ont des droits, mais aussi des
devoirs ", précise-t-il.
Georges Guézénoc alerte les
producteurs laitiers : " L'organisation économique n'évitera pas
les crises conjoncturelles, mais les atténuera. Combien de producteurs de
légumes serions-nous aujourd'hui, sans cette
organisation ? "
Tirer des leçons de l'expérience suisse !
La Suisse, pays d'herbage, comptant
plus de 27 000 producteurs de lait, remet en question son schéma
d'organisation, créé pour préparer les producteurs à la sortie des quotas
laitiers au 1er mai 2009.
Un déséquilibre dans le
rapport de force. Daniel Koller de la Fédération des Producteurs Suisses
de Lait présente brièvement les particularités de leur filière laitière :
-
2 groupes de distribution qui
représentent 85 % du marché.
-
4 laiteries qui transforment plus
de 80 % du lait de centrale.
-
31 OP (organisation de
producteurs ou pool régional) et OPU (Organisation de Producteurs-Utilisateur), dont certaines organisations
qui sont de " francs tireurs ". Aucune concertation entre les
organisations.
Vers un pool
national. " Nous avions comme projet initial la création d'un
pool national qui aurait pour objet la concentration du lait de centrale.
C'était sans compter sur les transformateurs qui ont fait échouer nos
discussions. " précise Daniel Koller.
Daniel Koller constate qu'au sein de
l'interprofession laitière, comprenant la grande distribution, il est
" impossible " de mettre en place une régulation. Il explique cette
incapacité par des organisations de producteurs opportunistes et un manque de
volonté des producteurs de respecter une discipline. Les transformateurs
interviennent également pour attiser la division entre les producteurs et
maintenir ainsi les problèmes de gouvernance au sein du maillon.
Face à ce bilan, les responsables de
la Fédération des Producteurs Suisses de Lait ont la volonté de reprendre en
main la gestion de la collecte, en conviant toutes les organisations à
concentrer leur lait au sein d'un pool laitier national. Daniel Koller invite
les producteurs français à retenir les leçons de cette expérience. Dans 5 ans,
la France laitière pourrait rencontrer les mêmes difficultés.
Au travers de ces deux exposés,
les intervenants ont mis en évidence que le renforcement du pouvoir de
négociation du maillon de production passera par une volonté forte des
producteurs de peser face aux transformateurs. Thierry Merret, Président de la
FDSEA conclut la journée en indiquant que " La répartition de la
marge dans la filière est le résultat d'un rapport de force. À nous de l'établir
en notre faveur ! Ce n'est qu'unis et organisés que nous pourrons
vivre de notre métier. "